Nous savons à quel point ce simple geste – refermer un livre au bout de dix, trente, cent pages – est douloureux pour vous. C’est pire qu’un petit remord anodin : c’est un aveu d’échec, un renoncement regrettable, un crime de haute trahison. Hé la, calmons-nous. La vraie question dans toute cette histoire, c’est : accepteriez-vous de passer cinq à dix heures avec un prétendant qui tout compte fait ne vous plaît pas et vous ennuie ? A moins d’être sadique et un peu fou, le réponse sera non. Et ce devrait être pareil pour les livres. Respirez donc, laisser tomber un livre est une chose tout à fait acceptable, et nous avons décidé de vous aider à briser ce tabou. Sachez que de même que toutes les femmes ou tous les hommes ne sont pas fait pour vous, tous les livres ne sont pas faits pour vous non plus. Pensez à la lecture comme à un engagement et vous verrez, tout ira mieux. Voici quelques bonnes raisons et cas de figure dans lesquels vous pouvez laisser tomber un livre sans culpabiliser. Take it easy.
1. Si un livre vous fait somnoler trop souvent voire vous endort tout à fait
Attention, c’est très mauvais signe. Vous n’imaginez pas de payer une entrée de cinéma pour vous endormir pendant le film ? Alors c’est pareil pour les livres. S’endormir le soir au coucher au bout de trois pages est une chose, mais s’endormir dans le train au bout de trois lignes, c’en est une autre. Ne vous infligez pas ça. Si vous passez plus de temps à dormir qu’à lire pendant votre temps de lecture, posez votre livre tout de suite et prenez-en un autre fissa.
2. Si vous avez relu plus de deux fois le même paragraphe
Vous savez, cette sensation insupportable de lire sans lire. C’est comme d’être affamé et de n’avoir rien que du pain et de l’eau à se mettre sous la dent. Et après, c’est l’escalade : l’irritation d’abord, puis la frustration, et une colère dévastatrice. Est-ce que ça en vaut la peine ? Non. Dans un livre comme dans la vie, il faudrait ne jamais commettre la même erreur deux fois. Regardez devant vous, prenez une grande respiration, et passez au livre suivant.
3. Si vous n’avez rien suivi de ce qui s’est passé dans les 5 dernières pages
C’est encore pire que le point 2 avec les paragraphes, mais cela peut arriver. Vous commencez votre lecture à la page 32 et à la page 39 qui marque le début d’un nouveau chapitre, vous vous apercevez que vous n’avez rien, mais alors RIEN suivi. Vous avez vaguement compris deux ou trois détails qui malheureusement ne vous disent rien de l’intrigue générale, et vous êtes bons pour reprendre presque 10 pages. Sachez que cette éprouvante pratique du sur-place ne vous amènera nulle part. Il vaudrait mieux vite larguer ce livre pour un autre. Conseil d’ami.
4. Si vous lisez davantage ce livre par devoir que par plaisir
Que celui qui ne s’est jamais plaint d’une lecture imposée au collège par la prof de français se dénonce. Nous avons tous plus ou moins connu cette boule au ventre avant un contrôle de lecture qu’on allait rater parce que malgré tous nos efforts et notre bonne volonté, nous n’avons pas pu dépasser la deuxième page de la préface du bouquin. Détendez-vous, l’école, c’est fini, et maintenant, lire doit rimer avec plaisir.
5. Si vous n’êtes pas suffisamment obsédé par ce que vous lisez et par les personnages
Normalement, quand vous lisez, c’est une obsession. Vous voulez incarner le personnage principal, vous tombez amoureux / amoureuse d’un(e) protagoniste que vous ne pouvez vous résoudre à oublier, et tout le temps que vous ne passez pas à lire, vous le passez à spéculer tranquillement, à vous demander ce qu’il va bien pouvoir advenir et à questionner vos sentiments. Oui, c’est une émotion divine et inégalable, et si vous ne l’éprouvez pas passé 20 pages, il y a peu de chance que vous l’éprouviez après. Un peu d’exigence !
6. Si votre lecture se fait longue, mais longue, jusqu’à en devenir interminable
Ça fait une heure que vous lisez, mais non, en fait, ça fait 5 minutes. Dans ce cas, inutile d’argumenter davantage, la règle mathématique qui suit vous dira quoi faire : si la durée de lecture perçue p est supérieure de plus d’un tiers à la durée de lecture réelle r, alors il faudra pour votre santé morale songer à changer de livre jusqu’à ce que cet écart de durée se réduise, voire s’inverse.
7. Si ce livre porte trop gravement atteinte à vos valeurs morales
On le sait depuis qu’on est petit : dans la vie, il y a des choses avec lesquelles il vaut mieux ne pas rigoler. Vos parents vous l’ont dit, c’est pas bien la guerre, c’est pas bien le racisme, c’est pas bien de tromper. Bon, ça ne veut pas dire qu’il ne faille pas lire Guerre et Paix ou Les Liaisons dangereuses, bien au contraire. Mais si jamais vous tombez sur un ouvrage qui fait vraiment outrage à vos principes, et que c’est au-delà du supportable pour vous, brisez là. Vous n’êtes pas obligé de manger de ce pain-là après tout.
8. Si la lecture ne va décidément pas en s’arrangeant
Vous êtes un incorrigible optimiste et vous persistez à penser que chaque page, et même chaque phrase sera meilleure que la précédente. Si c’est parfois vrai, faites-vous quand même à l’idée que la plupart du temps, c’est faux et archi-faux. Non seulement ça ne sera peut-être pas mieux, mais ça pourrait même être pire, et ça, c’est dur. Vous méritez mieux, fuyez tant qu’il est encore temps, avant le grand déclin.
9. Si le dépit vous rend trop sarcastique et désabusé
Comme un réflexe qui vient polluer la lecture sans que vous ne vous en aperceviez, vous vous prenez à vous moquer ouvertement de ce personnage que vous trouvez trop ridicule, trop plat et trop mièvre. Et puis vous vous entendez dire en juge désabusé que de toute façon la littérature n’est plus ce qu’elle était, que c’était mieux avant. Alors déjà, ce n’est pas très gentil pour ce personnage qui ne vous a rien fait, mais en plus, ruminer sur la littérature qui était mieux avant ne vous apportera rien. Bien sûr qu’il y a encore de la bonne littérature. Allez, finie la mauvaise foi, on passe à autre chose.
10. Si vous sentez que ce livre tue à petit feu votre immense amour pour la lecture
Si un jour ça vous fait ça, que vous sentez que vous n’aurez plus de papillons dans le ventre quand vous ouvrirez un nouveau livre, que vous ne vous direz plus jamais « j’aime tellement ce livre que je voudrais ne jamais le finir », alors arrêtez tout, tout de suite, et enterrez l’ouvrage que vous avez entre les mains, pour toujours.
Bref, tourner la page, c’est parfois difficile, mais c’est aussi nécessaire.
Alors, c’est quoi les livres que vous avez lâché ?
Joli top! Moi le dernier livre que j’ai lâché (le seul depuis bien longtemps), c’est Outbreak de Rohan Lockhart. Pourtant, l’histoire semblait chouette et les critiques paraissaient bonnes mais j’ai fait un mélange de 3) et de 6) ^^ Du coup, au lieu de stagner et de voir mon temps de lecture en quelque sorte gâché, j’ai préféré changer de lecture. Mais ça m’arrive très rarement car j’ai horreur de lâcher un bouquin…
Bravo à vous pour les images qui riment parfaitement avec l’état d’esprit , j’ai beaucoup rit .
Sinon bon article , c’est vrai qu’on culpabilise de ne pas terminer un livre :=)
Oui, il y a des livres chiants, de vrais navets, mais doit-on pour autant conseiller d’arrêter la lecture d’un livre dès le moindre signe d’ennui, ou dès la première imperfection (dans le style ou l’orthographe), je ne crois pas.
L’état d’esprit dans lequel on se trouve au moment de la lecture influe sur le ressenti que nous en avons, c’est donc un paramètre à prendre en compte. Il serait tout aussi stupide de dire « j’ai lu un livre de X, je ne l’ai pas fini parce qu’il était nul, et je ne lirai plus cet auteur », d’un roman à l’autre le style change, l’histoire aussi normalement.
Je ne nie pas qu’il y a des « foutage de gueule » parmi les livres proposés à la vente, cependant finir un livre permet de s’assurer qu’on n’est pas passer à côté d’une surprise intéressante. De toute façon, à moins d’avoir quelqu’un pour me raconter la fin (même si elle est archi prévisible), j’ai besoin de savoir comment ça fini.
Personnellement j’aime assez avoir un livre « moyen » le matin pendant mon petit déjeuner, au moins cela me permet de « décrocher » plus vite, afin d’aller travailler, je garde ceux qui me plaisent pour la soirée (souvent jusqu’à tard la nuit 🙂
Une seule des raisons citées m’incite à ne pas continuer une lecture : le numéro 7. Impossible de plonger dans une histoire où mes valeurs personnelles sont foulées au pied.
Moi j’en ai plein des livres commencés (parfois bien entamés) mais jamais finis. C’est vrai qu’on a du mal à les lâcher sans culpabilité. Je me pose toujours la question : Pourquoi je n’y arrive pas ? Parfois c’est un beau mélange (style, personnage, intrigue…) qui fait que, non vraiment, je n’accroche pas. Alors ils reposent à nouveau sur l’étagère, un marque page en attente. On ne sait jamais, un jour peut-être, je pourrai continuer. Car avec le temps on change et ce qui ne plaisait pas un jour devient accessible (et vice-versa – Les livres tant aimés dans ma jeunesse ont, pour certains, perdu leur magie).
A la lecture de cet article je n’ai pu m’empêcher de penser à l’essai de Daniel Pennac Comme Un Roman, un hymne à la lecture, qui, loin d’être un dogme doit être un rapport personnel et décomplexé aux livres.
Il rappel avec l’humour qu’on lui connaît « les droits imprescriptibles du lecteur »:
1- « Le droit de ne pas lire »
2- « Le droit de sauter des pages »
3- « Le droit de ne pas finir un livre » 😉
4- « Le droit de relire »
5- « Le droit de lire n’importe quoi »
6- « Le droit au bovarisme (maladie textuellement transmissible) »
7- « Le droit de lire n’importe où »
8- « Le droit de grapiller »
9- « Le droit de lire à haute voix »
10- « Le droit de nous taire »
Un essai qui a complètement changé mon rapport à la lecture!
Terrible cet article ! Je m’y reconnais totalement. Autant l’impression de honte ressentie à abandonner un livre et dans les raisons qui me poussent à le faire.
Allez, pour l’anecdote, quelques livres que j’ai lâché parmi les plus connus, histoire de dire que ça arrive à tous :
Le Trône de fer
Et oui, je fais partie de la rare frange des gens totalement imperméable à cette série que je trouve insipide, mal écrite (mais m’a-t-on dit, la traduction française est foireuse) et horriblement prévisible. Bref, j’ai lu 300 pages avant d’enterrer définitivement. Quand même.
Courrier sud et Pilote de guerre, Saint Exupery.
Parce que l’écriture… Non, vraiment ça ne passe pas. Je préfère rester sur le Petit Prince, bon, c’est un autre genre… J’ai dû lire une 30aine de pages de chaque.
Roi du monde, Jean-Philippe Jaworski
J’adore passionnément cet auteur, pourtant. Mais quant en lisant un livre vous avez juste la terrible impression, de bout en bout, de lire quelque chose écrit par quelqu’un d’autre que l’auteur, au bout du compte il vaut mieux le refermer. J’ai lu les deux tiers du premier volume de la trilogie, j’ai été tenace.
En général quant il s’agit de séries je lis le 1er volume en entier, je suis du genre un tout petit peu masochiste j’imagine… A vous !
Votre article porte à réflexion. J’ai laissé une fois un livre et je ne l’ai jamais oublié et j’ai même culpabilisé de ne pas être allé au bout.
Depuis tout livre commencé est terminé 🙂
Très bon article et les images sont très bien choisies.
Bravo, j ai adoré, c’est tellement ça , on sent le vécu !!! 🙂
Erich Fromm comparait la lecture à une conversation avec un ami. Il est des amis difficiles à suivre et quelque fois un peu ennuyeux mais on les écoute parce qu’on sait que l’amitié, c’est plus importante que le plaisir immédiat. Penser qu’un bon livre n’est là que pour procurer du plaisir est une grave erreur, on ne s’amuse pas beaucoup en lisant Marguerite Yourcenar (encore que) mais quel enrichissement!
Un article très amusant et véridique!
Je me retrouve parfaitement dans le point 8: être l’éternelle optimiste!
Je ne suis pas sûre (hélas) que cette article changera mes habitudes… 🙂
Personnellement j’ai déjà eu quelque problème avec certains livres, comme avoir envie d’avancer dedans mais avoir l’impression de faire du sur place, c’est horrible aussi! Quand le livres n’est pas immense et que je tient quand même à le finir, je me force et après je suis plutôt fière mais quand c’est un énorme pavé et que je me dit que si je n’avance pas et que je reste dessus je rate la lecture d’un livres bien mieux, j’arrête tout de suite!
En général c’est souvent juste une question de période, il y en a ou je n’ai pas l’envie de lire certains style de livres, et jusque la aucun ne ma résister, et heureusement sinon j’aurais louper beaucoup de choses!
Les livres abandonnés? Quelques-uns où toutes les 5 min, je regardais combien de pages il y avait encore à lire pour finir…. Avec le temps, ça devient de plus en plus facile de laisser tomber un livre qui ne m’inspire pas grand chose, il y en a trop qui attendent à côté pour perdre du temps à s’ennuyer.
Je souffre, je l’avoue, d’un surplus d’optimisme et de mon coté bélier qui me rend super butée. De fait, j’ai tendance à m’acharner sur des livres auxquels je n’accroche pas et n’abandonne en général pas avant d’avoir lu laborieusement cent voir deux cent pages. Je me dis toujours que ça va s’améliorer, que l’auteur met juste un peu de temps à installer le contexte… Et lorsque finalement j’abdique c’est toujours avec une pointe de culpabilité, exactement comme avec les lectures imposées à l’école^^ Merci pour l’article qui me remonte grandement le moral après deux livres à la suite abandonnés à cent pages de la fin.( L’évangile selon satan de patrick graham et la campagne des ombres de django wexler). Les livres en eux même ne sont pas en cause, c’est plus un problème de compatibilité amoureuse comme vous l’avez si bien expliqué^^ Beaucoup de gens vont vous conseiller d’explorer d’autres registres que votre style habituel de manière plus ou moins condescendante, et bien je suis venu, j’ai vu et j’ai été vaincue… Je préfère retourner à la lecture plaisir avec des romans légers plutôt que de vouloir me cultiver absolument et m’ennuyer à mort. Si quelqu’un me prends de haut avec sa littérature classique ou ses polars, je penserais aux fous rires que je me tape toute seule en lisant du Roxane dambre, à ces coups de foudre instantanés pour des beaux gosses de bit lit, d’urban fantasy ou bien de ces romances historiques avec de jeunes étalons en kilt qui certes ne sont pas toujours très conformes à la réalité historique mais ont le don pour me mettre des papillons dans l’estomac.
Dernièrement j’ai abandonné « La conjuration des imbéciles » je n’ai pas accroché du tout et je me poussait littéralement à le poursuivre compte tenu que David Bowie l’avait mis dans sa top 50 littérature! J’ai passé à travers les 10 étapes décrites précédemment et je l’ai enfin laissé tombé! R.I.P. David! ; )
Tout à fait vrai!!!! Et comme demandé dans l’article 4, je n’ai jamais rechigné à lire un livre pour les cours, ou alors j’ai arrêté de râler au bout de 10 pages parce que ça devenait intéressant ^^
Même si j’admets qu’avec « Candide » ça m’a ris la moitié du livre parce que je n’y trouvais absolument aucun intérêt littéraire xD
J’ai lâché quatre livre sur euuuuuh la multitude que j’ai lue ? Bon, et il y en a un (que je ne citerais pas !) que j’aurais adoré aimer lâcher mais je n’ai pas eu le droit ! Et dans ce livre, j’ai été victime de tous les points cités ci-dessus !
Les autres livres sont (attention roulements de tambours !) …… :
* A comme aujourd’hui (si si, je vous jure que ce n’est pas une blague)
* La voix du couteau, le tome 1 (vraiment, mais qui peut lire un livre pareil, les personnages parle français comme des vaches espagnoles qui auraient vécu 15 ans en Norvège ! C’est peut-être la traduction ?! Ben justement, je crois que non) Non non, je ne suis pas marseillaise, j’ai juste pas du tout aimé !
* La mécanique du cœur (je ne sais pas pourquoi, mais je n’ai pas apprécié)
* Parce que je t’aime (là, je n’ai pas pu. Totalement au-dessus de mes forces ! Pourtant c’est pas que c’est pas bien mais… enfin bref, impossible pour moi !)
Et celui que j’ai dit que je n’allais pas cité mais que je citerai quand même : Le Comte de Monte-Cristo ! Pauvre Comte quand même ! Je l’ai traité de tous les noms d’oiseaux, s’il avait vraiment existé, je ne vous explique pas ce que je lui aurais dit ! Pareil si j’avais eu Dumas en face de moi ! D’ailleurs, il a dû se retourner de sa tombe en m’entendant masacre son »œuvre » comme je l’ai fait !
Tu sais, il ne faut pas nécessairement abandonner une lecture parce qu’on lit le même paragraphe plusieurs fois. Peut-être que la personne était trop distraite. Dans ce cas, on reprend la lecture plus tard. Moi ça m’arrive souvent, et ce qui a de bien, c’est qu’on comprend parfois des détails qu’on aurait pu sauter par dessus en lisant trop vite. Quand une personne fini un livre de 300 pages en 2 jours, ce n’est pas nécessairement bon signe! Elle a peut-être adoré l’histoire, mais a passé par dessus la morale.
Moi, je n’ai lâché que deux seuls livres jusqu’à présent;
Pauses publicitaires, tome 1: Trente secondes de célébrité, par P. G. Kain
Et
Ouate de Phoque, tome 4: Prince charmant ou grenouille, par Camille Beaumier et Sylviane Beauregard
Le premier, c’est parce que j’avais du mal à apprécier le personnage principal, à me mettre à sa place. Le deuxième, j’avais déjà beaucoup de mal depuis le premier tome, et, avec le quatrième, c’en était trop pour moi, j’ai lâché ! L’héroïne est tellement naïve, j’avais trop de mal à m’identifier à elle.