Actualité : En Virginie, la justice condamne cinq délinquants à une peine de lecture

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Punir par la lecture, un moyen efficace de lutter contre le racisme et l’antisémitisme ? C’est en tout cas le parti qu’a pris par un juge de l’Etat de Virginie aux Etats-Unis pour sanctionner cinq mineurs après qu’ils aient vandalisé un établissement scolaire historique, la Ashburn Colored School. Bâtie trente ans après la fin de la guerre civile, en 1892, cette institution qui symbolise la lutte pour l’accès à l’éducation des jeunes afro-américains a été recouverte de graffitis obscènes et d’inscriptions à caractère raciste et antisémite.

Comme le rapporte un article du Guardian, le procureur chargé de l’affaire a estimé que le délit était davantage le fait de « jeunes idiots » qu’un acte de vandalisme ouvertement motivé par la haine raciale. La défense a notamment rappelé qu’aucun des mineurs condamnés n’avait eu de précédent avec la justice avant cette affaire. C’est donc assez logiquement que la justice a décidé de prendre des mesures visant à éduquer plutôt qu’à sanctionner les jeunes délinquants.

C’est ainsi que les cinq adolescents se sont vus infliger une peine ressemblant plutôt à une surcharge de devoirs scolaires qu’au bagne. En effet, la sanction comporte la lecture de 35 livres, le visionnage de 14 films, la visite de deux musées et la rédaction d’une note argumentée condamnant le sectarisme, qu’il soit d’ordre racial, sexuel ou religieux. La liste des lectures imposées par le juge se veut instructive et a été élaborée avec minutie. Elle comporte pour l’essentiel des œuvres qui dépeignent et condamnent l’intolérance. A titre d’exemple, figurent sur la bibliographie des livres comme La couleur pourpre d’Alice Walker, L’élu de Chaïm Potok ou Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur de Harper Lee. Quant aux films il s’agit là aussi d’œuvres engagées comme 12 Years a Slave et Lincoln.

Afin de vérifier la bonne exécution des sanctions, les jeunes condamnés sont tenus de présenter chaque mois le compte-rendu de plusieurs livres ou critiques de film. En outre, il leur est demandé de réfléchir à la portée des messages et symboles haineux prônés par les adeptes du white-power. Leur réflexion sur la question est consignée à l’écrit. Quant aux musées que les adolescents devront visiter, ils n’ont, là encore, pas été choisis au hasard, puisqu’il s’agit du musée de l’Holocauste et du musée de l’Histoire américaine.

Le juge chargé de l’affaire se dit optimiste par l’issue de cette peine fondée sur des ressorts pédagogiques – la prise de conscience et la responsabilisation grâce à l’acquisition de savoir – plutôt que sur des sanctions classiques, parfois inefficaces. Cette première expérience permettra à la justice d’évaluer l’efficacité de la méthode et de vérifier si elle constitue véritablement un moyen d’éclairer les jeunes et de les rendre plus tolérants. Bien que l’initiative suscite le débat, elle a au moins le mérite de faire parler d’elle, et d’inviter chacun à réfléchir au rôle de la justice au-delà de sa dimension punitive.

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A propos de Cecilia Sanchez 290 Articles
Chargée de communication et rédactrice chez Booknode

2 Comments

  1. Aura-t-on un article sur les résultats de la « sanction » ? J’espère que oui, sinon cet article restera incomplet. Car en théorie cela pourrait marcher, et c’est une expérience intéressante, mais ce sont les résultats qui comptent : d’une réussite pourrait s’ensuivre tout un changement dans le système, ou au moins ferait considérer aux suspects cette autre option qu’est éduquer au lieu de punir. Si cela n’aboutit à rien, il est toujours bon de le savoir.

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