Back to basics pour Amazon, le pari du livre physique pour la firme américaine

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La première librairie physique du géant Amazon a ouvert à Seattle, le concept devrait bientôt s’étendre à d’autres villes.

 

On nous a annoncé l’avènement numérique comme un tournant décisif pour les marchés des secteurs culturels. On nous a parlé du papier comme d’une ère révolue. On nous a dit que très vite, on ne lirait plus que sur des tablettes. Celles-ci rivaliseraient toutes d’innovation pour nous promettre des lectures toujours plus agréables, toujours plus authentiques, toujours plus pratiques. Seulement voilà, ce pari si ambitieux hier accuse le coup aujourd’hui, si l’on en croit certains spécialistes du marché du livre.

 

Le projet d’Amazon, leader de la vente de livres en ligne, de développer des magasins physiques aux Etats-Unis illustre bien le désir de nombreux consommateurs de revenir au parfum si caractéristique du papier et aux pages cornées. Cependant, sur un marché anglo-saxon particulièrement friand de livres numériques, l’initiative de la firme américaine paraît bien étonnante.  Pour rappel, aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, la part des ventes de livres numériques devrait dépasser les 55% cette année, mais l’Association of American Publishers a relevé une baisse des ventes d’e-books de 10% pour le début de l’année 2015. Sur le marché français, la surprise est moindre. Les ventes du livre papier dominent largement celles du livre numérique, une prédisposition qui semble durable. En effet, tandis que la progression des ventes d’e-books affiche une paresse notoire, le Syndicat de la librairie française déclare une augmentation des ventes de livres papier de 2,3% depuis un an. Alors, le retour au papier, simple passade ou tendance durable ?

 

Le regain du livre physique est lié à l’effet conjugué d’une préférence du papier chez les jeunes de la génération Y et de la difficulté des entreprises de livres numériques à rivaliser avec les grands fabricants de Smartphones et de Tablettes.  En outre, passé le binge reading* et l’engouement des premiers temps, la plupart des consommateurs d’e-books sont revenus à une lecture hybride, conjuguant livre numérique et livre papier. Le refroidissement des lecteurs à l’égard des liseuses n’entrave cependant en rien la dynamique digitale.

 

Ce que l’on observe, c’est que cette évolution est davantage boostée, pour l’heure, par les applications de lecture de livres sur Smartphone et Tablette, et qu’elle le sera demain par l’innovation dans des objets qui offriront une nouvelle expérience de lecture, et non un simple support de substitution, comme c’était le cas pour les liseuses.  C’est exactement la stratégie que propose Amazon par le biais de ses stores : relier une forte présence online à une expérience offline** conforme aux usages d’une population qui plébiscite les achats culturels en magasin. L’exigence croissante d’authenticité et la volonté d’un retour à l’essentiel de la part des consommateurs ravivent bel et bien le syndrome du back to basics***. Amazon l’a bien compris : peu importe le support, pourvu qu’on garde l’ivresse.

 

 

 

* binge reading : pratique effrénée de lecture.

 

** offline : par opposition aux usages online, c’est-à-dire en virtuel  sur Internet, le qualificatif offline désigne les pratiques de consommation qui ont lieu dans des magasins physiques et dans la vie réelle.

 

*** back to basics : littéralement retour aux basiques, l’expression désigne le retour à des pratiques plus simples, liées à une quête d’authenticité.

 

 

 

 

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A propos de Cecilia Sanchez 290 Articles
Chargée de communication et rédactrice chez Booknode

1 Comment

  1. Article vraiment intéressant,

    en effet étant moi même une hybride (lecture essentiellement en papier sauf en déplacement / vacances plus quelques titres que je ne possède qu’en numérique).

    Mais la grosse surprise est qu’Amazone ouvre un magasin physique. Dans mon esprit c’était LA différence essentielle entre la fnac et sa grande concurrente.

    Premier point intéressant est le fait que nous n’avons pas le même rapport à la lecture que nos amis anglo-saxons. En effet quand on regarde les chiffres (le « Les ventes du livre papier dominent largement celles du livre numérique,  » m’ayant poussée à chercher) nous sommes en France à 6,4% soit très très loin derrière anglais et américains. La question intéressante est « pourquoi? »

    Après se pose la question de l’évolution que pourrait connaitre e numérique.

    Une de celle-ci non négligeable, qui pourrait servir à la fois les maison d’édition et les lecteurs, seraient que si le lecteur choisit la version papier, il puisse par un supplément symbolique, acquérir simultanément la version numérique.
    Car si le papier plait par son authenticité, son côté concret, sa « palpabilité » il est bien des occasions ou l’on regrette ne pas avoir également le numérique. Et ce pour l’avantage certain du numérique qui est son immatérialité, qui le rend aisément transportable.

    Reste à voir si jamais cette idée est viable.

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