Top 12 : Les livres préférés de David Bowie que nous devrions tous (re)lire

 

 

David Bowie Holding Buster Keaton Biography

 

Depuis la disparition de David Bowie, le 10 janvier dernier, les hommages se sont multipliés, et nous nous sommes mis à écouter en boucle les grands tubes de l’artiste pop, qui compte parmi les talents les plus excentriques et créatifs de la seconde moitié du XXè siècle. De « Space Oddity » à « Ashes to Ashes » en passant par « The Man Who Sold the World », « Under Preasure » ou encore « Let’s Dance », celui que l’on appelait aussi Ziggy nous a finalement laissé de quoi nous consoler un peu de sa disparition.

Mais David Bowie n’est pas salué uniquement pour ses talents d’auteur-compositeur et de chanteur. Nombreux sont ceux qui le reconnaissent comme une figure de proue des arts, visuels évidemment, mais intellectuels aussi. En effet, le chanteur britannique était aussi un lecteur insatiable. Nous sommes allés chercher parmi son top 100 personnel les livres qui nous ont également le plus marqués. C’est parti pour un top spécial hommage qui vous fera réaliser à quel point David Bowie était un homme bien, et vous donnera peut-être au passage quelques idées de lecture.

 

 

1. La brève et merveilleuse vie d’Oscar Wao de Junot Diaz

 

la-breve-et-merveilleuse-vie-d-oscar-wao-229399-250-400Un peu comme David Bowie, Junot Diaz est un ovni. Un auteur entré en littérature par effraction en 1996 avec le tonitruant recueil de nouvelles Comment sortir une Latina, une Black , une blonde ou une métisse, et déjà salué par une langue singulière. Mais ce n’est qu’après un silence sourd et une gestation interminable de douze ans que l’écrivain publie sa brève et merveilleuse vie d’Oscar Wao, un ouvrage à la hauteur de la critique, qui classait déjà Junot Diaz parmi les auteurs les plus prometteurs du XXIè siècle. Le livre fourmille de ce langage hybride qui mélange espagnol et anglais, et qui surprend par sa grande vitalité. Une vitalité que l’on retrouve aussi chez les personnages qui composent la famille Cabral, contrainte de fuir la dictature de Trujillo à Saint-Domingue pour aller s’installer dans le New Jersey. Là, il y a Belicia, la mère, Lola, la fille, insouciante et intrépide, et Oscar, jeune homme obèse et solitaire qui collectionne les déconvenues. Ajoutez à cette atmosphère un savant dosage de croyances, rumeurs et superstitions caribéennes à la Garcia Marquez, et vous voilà embarqué dans un récit hautement coloré, un peu loufoque, et passionnément humain. On comprend mieux pourquoi le roman figure dans le top de David.

 

 

2. Nowhere to run, étoiles de la soul et du rythm & blues de Gerri Hirshey

 

512-rcJOrFL._SX326_BO1,204,203,200_Evidemment, il ne pouvait pas manquer à ce top un livre culte du milieu musical. Un livre monumental diront même certains. C’est dans un voyage électrique et survolté que nous emmène l’auteur Gerri Hirshley dans son Nowhere to run. Detroit, Memphis, New York, Cincinnati, Chicago, la Nouvelle-Orléans, voilà les routes de la soul qui vous mèneront à Stevie Wonder, Marvin Gaye, Diana Ross, Ben E. King, James Brown, Michael Jackson, Aretha Franklin, bref, les très très grands. Publié pour la première fois en 1984, cet incontournable est devenu un classique pour les passionnés de soul, de blues et de hip hop. Histoire aux confins du rythme, Nowhere to run est un livre dont David Bowie a visiblement fait bon usage. L’élève aurait-il dépassé le maître ? On vous laisse vous faire votre avis.

 

 

3. Money, money de Martin Amis

 

money,-money-648084-250-400Martin Amis, c’est un peu le Houellebecq britannique. Et Money, money, c’est un de ses romans les plus sulfureux. Grossier, provocant, morbide, cynique et sans concession, le style est à la hauteur de la dénonciation entreprise par l’auteur. Car ce sont bien les excès du capitalisme occidental que Martin Amis entend pointer d’un doigt accusateur. Dans ce roman publié en 1984, John Self, publicitaire et futur cinéaste en manque de considération, incarne parfaitement l’homme « accro au XXè siècle ». La malbouffe des fast-food et la pornographie, voilà ce dont il s’empiffre toute la journée. On ne saurait trop si c’est à rire ou à pleurer, mais posé sur ce grossier chaos, le style de Martin Amis est merveilleux de dérision. Tout comme David Bowie, la consécration de Martin Amis vient en grande partie de sa posture avant-gardiste, anti-conventionnelle et sûre d’elle-même. Preuve en est que le Time fait figurer Money, money dans sa liste des cent meilleurs romans de langue anglaise publiés entre 1923 et 2005.

 

 

4. Le Perroquet de Flaubert de Julian Barnes

 

le-perroquet-de-flaubert-9358-250-400Ecrit par le britannique Julian Barnes, ce roman, publié lui aussi en 1984 a été successivement sélectionné pour le Booker Prize à son année de parution, et récompensé en France du Prix Médicis en 1986. En même temps, quand Gustave Flaubert est mis à l’honneur, qui plus est par un Anglais, difficile de résister à la tentation de pouvoir se jeter (un peu) des fleurs. Ici le personnage légèrement excentrique de Geoffrey Braithwaite mène une enquête (joyeusement timbrée)  sur son auteur fétiche, et découvre que deux musées dédiés à Gustave Flaubert prétendent détenir le perroquet qui l’aurait inspiré dans l’écriture d’Un coeur simpleLoufoque et drôle, ce roman qui révèle une belle plume est aussi un joli hommage à l’auteur préféré des profs de prépa. Et c’est plus facile à lire que Madame Bovary. It’s up to you.

tumblr_li8i00t7af1qzoaqio1_r1_400

 

 

5. La conjuration des imbéciles de John Kennedy Toole

 

la-conjuration-des-imbeciles-4155-250-400Tout le génie de ce roman est synthétisé dans le titre. Et dans l’histoire du pauvre John Kennedy Toole (décidément un nom qui ne restera pas dans les annales pour avoir porté chance à ceux qui le portaient) qui a littéralement lutté pour faire publier son livre. Après de nombreux refus, l’écrivain se suicide, et ironie du sort, lorsque sa maman parvient enfin à le faire publier, c’est un immense succès, même une consécration, puisque le roman se voit décerner le très prestigieux Prix Pulitzer en 1981. Comme quoi, il faut toujours persévérer. Toujours. C’est pas parce qu’une oeuvre est décriée par beaucoup qu’elle ne vous fera pas entrer dans l’histoire. Et c’est pareil pour les chanteurs. Et les acteurs. Et les peintres. Et tous les artistes. Mais le monde est pétri d’imbéciles, et ça, les plus grands le savent bien.

 

 

6. Le zéro et l’infini de Arthur Koestler

 

le-zero-et-l-infini-46289-250-400Au vu du classement, nous sommes en mesure d’affirmer que David Bowie a beaucoup aimé les fictions politiques. Avec une telle popularité, peut-être aurait-il pu faire un bon président des Etats-Unis, fonction universelle suprême, mais la sensibilité artistique l’a emporté, et pour le meilleur. Par contre, comme à peu près tous les artistes pensants du XXè siècle, il s’est laissé aller à un certain intérêt pour le communisme et ses dérives, ce que la présence du Zéro et l’infini dans son top livres révèle bien. Roubachof, le héros de ce roman, est évidemment opposé au gouvernement et son rôle de militant dans la Révolution Russe lui vaut d’être salement jeté en prison. Lutte de l’individu contre la masse et de la liberté contre l’oppression, le roman d’Arthur Koestler nous donne de quoi réfléchir sur notre nature profondément politique. Et bien entendu, ça nous donne envie d’être, nous aussi, un peu politiquement incorrects.

 

 

7. De sang-froid de Truman Capote

 

de-sang-froid-3172-250-400De sang-froid, ou plus précisément De sang-froid : récit véridique d’un meurtre multiple et de ses conséquences est un roman-vérité signé par un monsieur plutôt génial et publié en 1966. L’histoire tire sa source d’un fait-divers ayant eu lieu dans le Kansas en 1959, où quatre membres d’une même famille de fermiers ont été retrouvés assassinés sans mobile précis par deux jeunes hommes. Le but de Capote ? Revenir sur les faits de façon chirurgicale, méthodique, rigoureuse. Bref, un vrai roman d’investigation qui fait le tour de la scène de crime, du lieu, des protagonistes, et s’intéresse notamment, et de façon remarquable, à la psychologie des deux tueurs. Immédiatement salué par la critique, le roman de Truman Capote s’impose sans attendre comme un classique de la littérature américaine. On peut d’ailleurs noter que De sang-froid vous glace suffisamment les sangs pour être classé en 54e position dans le palmarès des meilleurs livres policiers de tous les temps. Pas de doute, on est encore une fois dans le haut du panier, et on pourrait pousser la comparaison en disant que Truman Capote est au genre policier ce que David Bowie est à la pop.

 

 

david-bowie-the-prestige

 

 

8. Le Guépard de Giuseppe di Lampedusa

 

le-guepard-3571-250-400Un titre qui parle à tout le monde pour un auteur qui n’a écrit que ce seul roman et n’a pas eu le temps de savourer le succès de sa publication posthume. Datant de 1958, Le Guépard relate la vie de Fabrizio Salina, un prince sicilien confronté aux résurgences révolutionnaires de la fin du XIXè siècle en Italie, une période que l’on appelle aussi « Risorgimento », et qui signifie « renaissance ». Très critique envers l’élite italienne, Le Guépard est une fiction historique et un récit de rébellion comme on les aime. Déjà, il y a un prince, mais il y aussi et surtout de l’argent, du pouvoir, du soleil, des belles filles (enfin une surtout), de l’amour et après, c’est le déclin total pour cette intrigue menée d’une main de maître par la plume ambitieuse et flamboyante de Giuseppe. Et si vous trouvez le livre trop long, vous pouvez toujours opter pour l’adaptation cinématographique (même si ce n’est jamais pareil, on ne va pas vous le cacher) de Luchino Visconti avec la crème de la crème des années 1960 : Alain Delon et Claudia Cardinale. Nous vous laissons méditer sur cette belle phrase du livre : « Nous fûmes les guépards, les lions ; ceux qui nous remplaceront seront les chacals et les hyènes. Et tous, guépards, chacals et moutons, nous continuerons à nous considérer comme le sel de la Terre. » Fuyons les charognards, chers amis.

 

 

9. Sur la route de Jack Kerouac

 

sur-la-route-1885982-250-400Si vous rêvez de traverser les Etats-Unis en long en large et en travers et que vous n’avez pas le temps – le voyage que décrit Kerouac dure quand même 3 ans -, sachez que vous pouvez lire ce livre. Ce sera moins palpitant évidemment qu’un voyage in real life, mais peut-être tout aussi intéressant. Ca vous fera , quoi qu’il en soit, au moins une bonne préparation. Et puis il faut quand même ajouter que ce roman fondateur de la « Beat Generation » a été écrit d’une traite, en trois semaines, sur un parchemin de plus de 35 mètres. Pratique, mais pas dingue pour les éditeurs qui ont dit à Kerouac de retravailler ce texte peu conventionnel et obscur avant qu’il ne soit publié, six ans plus tard. Bref, en plus du thème du road trip, qui est un classique repris bien des fois depuis la publication du roman de Kerouac, cette histoire nous montre qu’il y aura toujours des génies incompris pour écrire en un temps record un chef d’oeuvre, et toujours des éditeurs frustrés et jaloux pour compromettre un succès. Règle immuable que vous pouvez transposer à tous les domaines artistiques.

 

 

10. Lolita de Vladimir Nabokov

 

lolita-408-250-400Décidément, David Bowie aimait bien les histoires scandaleuses. Nous aussi. Et Lolita, c’est peut-être l’un des romans les plus immoraux et beaux du XXè siècle. Humbert Humbert, amateur de nymphettes, y raconte son obsession et sa passion pour sa belle-fille, Dolorès Haze, alias Lolita, qui, précisons-le, n’a que douze ans. Bref, en 1955, date de la publication du roman, c’est un scandale total. Pédophilie, inceste, il n’en fallait pas moins pour, évidemment, censurer le livre. Mais bon, encore une fois, le puritanisme n’a pas suffi à détrôner l’oeuvre, dont le talent éminemment littéraire et poétique donne à l’errance effrayante et émouvante de ce Humbert Humbert libidineux une couleur particulière. Et c’est donc par le soufre que vient la récompense : Lolita est souvent cité comme l’un des ouvrages les plus marquants du XXè siècle. En littérature comme dans la vie, faites que le vice amène la vertu. Cela marche, parfois.

 

 

11. 1984 de George Orwell

 

1984-275-250-400David Bowie a aimé beaucoup de livres publiés en 1984, et il a aussi aimé 1984 lui-même (paru en 1949 par contre), qui lui a d’ailleurs inspiré l’album Diamond Dogssorti en 1974. Mais vu que ce n’était pas son meilleur album, ni sa meilleure époque, le chanteur aurait peut-être dû se contenter de lire le livre sans en faire un remake. Voulant d’ailleurs adapter explicitement  le roman d’Orwell dans sa tournée, les ayants droits de l’écrivain le lui refusent, puis c’est la chute : cocaïne, isolement, paranoïa. Heureusement, David est plus fort que tout ça, et il rebondira avec l’album suivant Young Americans, qui sort un an après. Malgré quelques ravages et divagations totalitaires et mystiques, 1984 reste dans le panthéon littéraire de David Bowie et prouve qu’il n’était décidément pas un homme rancunier. Âmes sensibles, ne vous abstenez pas, ce n’est là qu’un livre à lire avec précaution.

 

 

12. Black Boy de Richard Wright

 

black-boy-115593Evidemment, on ne peut pas parler de David Bowie sans évoquer son combat courageux contre l’homophobie et les autres formes de discrimination – dont évidemment le racisme -, à une époque où elles étaient monnaie courante. Pas étonnant donc, que Black Boy, roman autobiographique écrit par l’immense Richard Wright et publié en 1940, ait ému notre chanteur. Rappelons que c’est là l’un des premiers récits écrits par un noir sur la condition noire. Ce qui fait de cet ouvrage un monument de résistance et de courage. Des valeurs que David Bowie incarnait lui aussi à merveille.

 

 

Voilà, vous avez rêvé de lui ressembler, ce sera peut-être possible (un peu) quand vous aurez déjà lu tout ça. Bonnes lectures à tous et un dernier salut ému à l’un des meilleurs ovnis que nous ait apporté le XXè siècle.

+1
0
+1
0
+1
0
+1
0
+1
0
+1
0
A propos de Cecilia Sanchez 290 Articles
Chargée de communication et rédactrice chez Booknode

2 Comments

  1. Wow, ce top est génial ! En tant que fan de David Bowie, mais aussi de littérature en générale, j’été ravie de découvrir des livres dont le doux nom m’était inconnu ! Vos analyses sur chaque ouvrage sont très intéressantes, et les relier à la vie de Bowie est aussi sympathique !
    Vraiment inspirée et conquise par cette liste de livres (qui, il me semble, sont tous d’exception !) !

1 Trackback / Pingback

  1. David Bowie donne envie de lire | Myriades

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*